Nicolas de HOEY, peintre en Bourgogne

Publié le par Bernard

Pourquoi parler de cet artiste ?

Sur ce blog la catégorie : « Eglise de la Ste Trinité » présente les tableaux de l’atelier de Nicolas de Hoey car plusieurs très grands tableaux de l’atelier de ce peintre, classés monuments historiques, y sont visibles.

Marguerite GUILLAUME, alors conservateur en chef du Musée des Beaux-Arts de Dijon, a consacré une importante étude sur ce personnage : « Un flamand italianisant en Bourgogne, Nicolas de Hoey » et le musée des Beaux-Arts de Dijon a édité un catalogue avec, entre autres, des œuvres de celui-ci en 1990 : « La Peinture en Bourgogne au XVI° siècle. »

La présente rétrospective utilise les textes de Marguerite GUILLAUME qui a donné son autorisation et ceux du catalogue du musée, la direction du Musée des Beaux-Arts de Dijon ayant donné également son autorisation.

 

La Vie de Nicolas de Hoey – mentionné de 1567 à 1611

 

Nicolas de Hoey est né en Hollande à Leyde à la fin de la première moitié du XVI° siècle – mais on ignore exactement quand – dans une famille qui comptait 8 enfants. Son frère Jean, fut lui-même peintre renommé. La famille se dispersera et Nicolas arrive à Dijon dans la deuxième moitié du XVIème siècle.

Auto-portrait de Nicolas de Hoey

Détail du tableau de « St Luc peignant la Vierge »

Musée des Beaux Arts de Dijon

 

C’est en 1564 que le nom de Nicolas apparaît en Bourgogne pour une commande lors de l’entrée du roi Charles IX dans la ville. L’artiste ne devait pas encore habiter en Bourgogne car il est dédommagé pour son déplacement.

En 1575, il est reçu maître-peintre. Il épouse Marguerite Darlet native de Dole. Tous deux sont des étrangers car Dole à l’époque n’est pas française. Ils se font naturaliser en 1579. Déjà en 1576, Nicolas avait acheté une vigne ce qui prouve son intégration à la Bourgogne. Nicolas et Marguerite s’installent dans la paroisse St Michel. En 1581 naît leur première fille : Jeanne, suivie en 1584, de Colette. En 1593, les époux habitent la paroisse St Jean mais Marguerite meurt et Nicolas se remarie avec Bénigne Periquet. Nicolas meurt à son tour au début du XVIIème siècle car bénigne est veuve en 1612.

On ignore le nom du maître auprès duquel Nicolas fit son apprentissage. A Dijon, il débute petitement en prenant part à des travaux anonymes. C’est la commande, en 1582, sans doute par Bénigne Laverne, conseiller du Roi puis président du Parlement, de la peinture murale « La dormition de la Vierge et la Trinité » qui orne la chapelle des Lavernes à Saint-Michel qui consacre son talent. Dès lors les commandes affluent. En 1585, la renommée de l’artiste passe les frontières avec la commande des tableaux de Fribourg.

En 1590, il doit avoir la cinquantaine, Nicolas de Hoey est « peintre du roi venu à Dijon pour y fonder sa résidence » et à ce titre il est privilégié puisqu’il est exempté du paiement de la taille et qu’il échappe également à la garde et au guet.

Autoportrait de Nicolas de Hoey

Détail de la fresque « La mort de la Vierge

Eglise St Michel de Dijon

L’art de Nicolas de Hoey est composite (composé d’éléments de nature très différente). Il allie la sensibilité flamande d’un Martin de Vos avec les concepts italiens du Tintoret et de Véronèse. Cet expatrié qui a acquis des sympathies dans la société la plus éclairée de Dijon a su s’adapter aux fluctuations d’une époque incertaine puisant son inspiration aux sources de la Réforme et de la Contre Réforme pour être « l’excellent peintre » dont parle Etienne Tabourot en 1587

 

Quelques repères : Charles IX est roi de France avec principalement la régence de Catherine de Médicis de 1561 à 1574. Puis ce sera Henri III jusqu’en 1589, et le règne d’Henri IV

 

Découvrons donc quelques œuvres de ce grand peintre.

 

La Dormition de la Vierge – tableau attribué à Nicolas de Hoey

 

L’artiste recherche les vastes surfaces à décorer et comme indiqué précédemment : la mort de la Vierge de l’église Saint-Michel de Dijon le montre à l’aise pour agencer l’espace, qu’il conçoit, non sans audace, en profondeur. C’est ainsi que l’on découvre cette peinture murale décorant la paroi orientale de la chapelle des Laverne de l’église St Michel de Dijon

 

La partie inférieure est effacée, au registre supérieur subsiste une Dormition très caractéristique du style de Nicolas, la date de 1581 portée au-dessous, en fait la plus ancienne œuvre connue de l’artiste.

De par sa forme étroite et haute, la surface à décorer détermine une composition à deux étages. Au sommet, dans la partie limitée par les arcs, la colombe du Saint-Esprit, puis le Père et le Fils assis à côte à côte, annoncent la Trinité de Vitteaux. Au-dessous, les apôtres pleurent la Vierge couchée sur son lit de mort.

Église St Michel de Dijon, fresque : La Dormition de la Vierge

 

Le Quo Vadis et le Christ vainqueur de la mort tableaux - Tableaux signés

 

La réputation de l’artiste s’étend loin puisqu’il exécute, en 1585 et 1587, deux tableaux pour Hans de Lanthen Heydt, membre du Sénat de Fribourg en Suisse Quo Vadis et le Christ vainqueur de la mort, l’un et l’autre conservés à la cathédrale de la ville.

Ainsi la cathédrale de Fribourg, abrite accrochés au-dessus du côté nord du chœur ces deux grands tableaux présentés dans des cadres richement décorés et de style plus tardif. Le Quo Vadis est signé et daté comme suit : N. de Hoey fe. 1585. Il met en scène Saint-Pierre agenouillé aux pieds du Christ, presque entièrement nu, qui le bénit.

Pour le Christ vainqueur de la mort, dans l’angle inférieur du tableau on lit ces mots : Hans von Landten genant Heydt, Ryter, 1587. La colombe du Saint-Esprit domine la composition de la toile, avec le Père éternel qui fait irruption en haut à droite. Debout sur la croix gisant à côté de sa tombe béante, où se love le serpent tenant dans sa gueule la pomme fatidique, apparaît le Christ ressuscité, à côté d’un squelette renversé. De chaque côté dans un halo de lumière céleste, on distingue les quatre évangélistes avec leurs animaux symboliques. Au-dessous, des anges jouent de la musique.

Bien que non signé, ce tableau s’apparente si étroitement au Quo Vadis qu’il peut être compté au nombre des quatre œuvres certaines de Nicolas.

 

Quo Vadis

 

Le Christ vainqueur de la mort

Le triptyque de Vitteaux. Tableau signé

 

Huit ans séparent le Quo Vadis de Fribourg d’avec le tryptique actuellement conservé à l’église St Germain de Vitteaux en Côte d’Or.

Le panneau central représente la Trinité, les deux personnes divines le Père et le Fils sont identiques, avec cette différence que Dieu le Père est drapé et que le Christ à la poitrine nue pour montrer les stigmates de la passion. Tous les deux symétriquement assis sur des nuées, posent la main sur le globe du monde au-dessus duquel plane un halo, la colombe du Saint-Esprit.

Autour de la Trinité divine, sont groupés des anges portant les instruments de la Passion. Deux grands anges soulèvent l’un la croix, l’autre la colonne de la flagellation. Les deux angelots qui planent au-dessus d’eux, portent les verges, la lance et l’éponge de fiel. Enfin, ceux qui sont aux pieds du Christ tiennent le marteau et les clous.

Chacun des volets réunit un groupe d’apôtres. A gauche, on reconnaît à leurs attributs saint Pierre, saint Jean l’évangéliste et saint André assis et derrière eux saint Jacques le majeur, saint Barthélémy revêtu de sa dépouille où se devine un visage humain et saint Jacques le mineur muni de la massue dont il fut assommé.

L’autre volet de droite regroupe Saint Simon avec sa scie, saint Matthias porteur d’une hache, remplaçant Judas, saint Paul et au second rang saint Philippe avec sa croix et saint Matthieu tenant son hallebarde, La pique désigne saint Thomas tandis-que le dernier apôtre figure, sans doute, Jude Thaddée.

Au revers sont peints en grisaille la Vierge et l’ange de l’Annonciation, sur le marchepied de Marie se lit l’inscription N DE HOEY FECIT 1594

 

Le triptyque de Vitteaux

 

Saint Luc peignant la Vierge. Tableau signé

 

La 4ème peinture certaine de Nicolas représente Saint Luc Peignant la Vierge provenant de l’église de Moloy et conservée au musée des Beaux-Arts de Dijon où l’on peut l’admirer.

L’œil du spectateur va de la présence souveraine de la Vierge et de l’enfant à leur image sur le tableau qui témoigne du pouvoir de l’artiste : non seulement saint Luc a le don de fixer l’effigie divine mais encore d’intervenir en modifiant le geste de Jésus qui, sur la peinture, bénit le spectateur. Au fond, un paysage en cours d’exécution.

Le tableau est signé à gauche sur le marchepied de la Vierge : NICOLAS DE HOEY FECIT ET DONO DEDIT 1603

 

Saint Luc, peignant la Vierge

 

Le triptyque de l’église de la Madeleine à Dijon. Panneaux attribués à Nicolas de Hoey

 

L’église de la Madeleine n’existe plus à Dijon. Celle-ci fut construite en 1514 puis vendue à la Révolution et transformée en immeuble d’habitation. En 2017 subsiste un beau portail renaissance rue Amiral Roussin.

 

La partie centrale du tryptique, une adoration des bergers est disparue. Au Musée des Beaux-Arts de Dijon on peut admirer les deux panneaux qui fermaient celui-ci :

1 – Claude Bretagne, conseiller au Parlement de Bourgogne et ses fils, gendres et petits-fils.

2 – Denise Barjot, femme du, Claude Bretagne et ses filles.

Comme le permet l’identification de St Denis figurant au revers du panneau, c’est bien Denise Barjot qui fait exécuter ce tryptique en 1607 à la mémoire de son mari défunt afin d’orner l’autel de la chapelle des Bretagnes en l’église de la Madeleine où se trouvait sa sépulture. De même la présence de St Claude au verso du panneau nous renseigne sur l’identité du personnage représenté : Claude Bretagne. Ses quatre fils entourent le doyen. L’aîné en robe noire est agenouillé sur un coussin, les trois autres fils, tous conseillers, portent comme leur père la robe rouge. Deux des gendres, en robes noires, se tiennent debout derrière lui, probablement les maris de ses deux filles aînées car les deux autres gendres n’y figurent pas. Mais au fond, deux adolescents y sont représentés.

Sur le second panneau : Denise Barjot aux traits flétris, sans doute très âgée avec son nez tombant et jusqu’à sa verrue est représentée avec ses quatre filles : Denise, l’aînée agenouillée sur un coussin rouge, Jeanne la seconde, Marthe la troisième et Claudine, la plus jeune.

Denise Barjot porte la fraise tuyautée et l’attifet recouvert du voile de veuve de l’époque de Catherine de Médicis. Ses filles préfèrent un large col de lingerie fine, en éventail, rehaussé de précieuses dentelles italiennes.

 

Claude Bretagne…

Denis Barjot et ses filles

 

Les trois anges visitant Abraham – Tableau attribué à Nicolas de Hoey

 

Cette peinture est conservée au Presbytère de Fontaine-les-Dijon.

 

Le sujet de ce tableau est emprunté au chapitre 18 de la Genèse, lorsque Dieu envoie Abraham à 3 anges chargés de lui annoncer la proche maternité de sa femme Sarah.

La composition est réduite aux personnages essentiels, cadrés en gros plan sur un fond de paysage : Abraham agenouillé avec ferveur, les anges assis autour de la table servie en plein air et Sarah devinée dans la pénombre.

 

Le Sacrifice de Noé après le déluge Epoque de Nicolas de Hoey

 

Cette peinture est également conservée au Presbytère de Fontaine-les-Dijon.

 

Cette œuvre est textuellement reprise d’après la quatrième scène de l’Histoire de Noé, peinte par les élèves de Raphaël aux loges du Vatican. Cette toile, de faible qualité, semble émaner d’un collaborateur plutôt que de Nicolas lui-même, peu soucieux, sans doute, de se livrer à une œuvre de copiste, mais qu’il ait confié ce travail à ses aides ne serait pas étonnant.

La qualité de la reproduction est mauvaise, mais cela permet de découvrir cette peinture

 

La Cène – tableau attribué à Nicolas de Hoey

 

Cette peinture inédite a été la propriété du chanoine Liger-Belair à Vosne Romanée. Ni signé, ni daté, ce tableau peint sur bois reprend une gravure de Jean Sadeler exécutée en 1582 d’après Martin de Vos.

Le chanoine Liger-Belair (décédé en 1991) a précisé que la Cène en sa possession, peut être de Nicolas car elle lui vient d’une branche de sa famille qui avait acquis en 1819 le château d’Is-sur-Tille. Or cette propriété était demeurée aux mains des Bretagne depuis la mort en 1670 de Claude Frémiot. Une telle provenance, plausible, contribuerait à attribuer le tableau à Nicolas de Hoey.

Aujourd’hui, la trace de cette œuvre est perdue…

Et encore et encore…

 

Au château d’Ancy-le-Franc, les peintures murales de la chambre de Diane et (pour partie) la galerie de Pharsale…

Dans l’église St Laurent d’Arnay-le-Duc, une Dormition de la Vierge panneau central et le volet droit représentant Claudine Duban etc… Ces tableaux seraient de son atelier.

 

 

Le Christ en l’église de Baulme la Roche – Le Christ de Nicolas de Hoey

Des copies, léguées à l’hôtel Dieu de Beaune : Philippe-le-Bon, Philippe-le-Hardy, Jean-sans-peur.

Philippe le Bon

A l’église St Rémi de Selongey, deux panneaux, (peut être de l’atelier de Nicolas de Hoey) une adoration des bergers et une adoration des rois dont les revers sont ornés de grisailles d’un style semblable à celui du St Claude et du St Denis au verso des panneaux Bretagne : le Baptême de Clovis par Saint Rémi et la consécration de l’évêque de Reims.

Etc… etc…

Publié dans Culture

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